Le 21 mars dernier, Abdullah Öcalan, la figure historique du mouvement kurde de Turquie, a appelé le PKK à ouvrir une réflexion sur l’abandon définitif de la lutte armée. Cet appel confirme l’avancée du processus de paix entre le gouvernement turc et les représentants du mouvement kurde. Alors que les années de guerre civile s’éloignent progressivement, l’héritage du conflit apparaît de plus en plus clairement : plus de 45 000 morts et un pays dont les divisions géographiques, ethniques et sociales sont devenues béantes. Depuis les années 2000, un ensemble hétéroclite d’acteurs, unis au cours des années 1980 et 1990 par leur combat pour la défense des droits de l’homme, a pris acte de la baisse d’intensité du conflit et commence à poser les jalons de la transition vers une société apaisée. À travers des projets de « mémorialisation », de réconciliation et en utilisant l’expérience internationale, ils sont les précurseurs de l’application de la justice transitionnelle en Turquie.
Que se passera-t-il le 24 avril 2015 ? REPAIR a posé la question à des leaders d’opinion de Turquie, d’Arménie et de Diaspora Arménienne. Jour de commémoration du Centenaire du génocide des arméniens, cet événement que les Arméniens ont souhaité mondial est mis en concurrence avec les célébrations de la Bataille de Gallipoli que le gouvernement turc a déplacé pour l’occasion. Simple jour du souvenir pour certains, raz de marée dévastateur pour d’autres, non-événement politique ou début d’un changement de paradigme… les avis sont loin de faire l’objet d’un consensus.
À l’occasion du centenaire du génocide arménien, Cengiz Aktar estime nécessaire d’évoquer la question de l’établissement d’une justice pour les descendants des victimes. Selon lui, la Turquie peut, par différents moyens, indemniser les pertes vécues. La dénonciation des responsables du génocide, jusqu’à présent honorés en Turquie, peut constituer l’une des nombreuses composantes du volet moral des indemnisations. Selon l’auteur, celles-ci peuvent être mises en place sans passer par la reconnaissance du génocide par l’État turc, qui reste l’interlocuteur principal concernant les demandes des Arméniens.
L’année 2015 est à la fois l’année des opportunités pour la cause arménienne mais aussi celle de tous les dangers pour la politique intérieure et extérieure de l’Arménie. Or, les initiatives sur le front de la cause arménienne requièrent un consensus transnational arménien. Pour l’heure, les attentes, très fortes, de la diaspora sont sensiblement déçues tant par l’absence d’anticipation que par le manque de visibilité des actions entreprises, que ce soit par l’État arménien, les principales institutions politiques de la diaspora, mais aussi, par le comité unifié du centenaire ; ce qui n’est point une surprise : cela fait plus de deux ans que des voix s’élèvent en diaspora pour dénoncer l’absence de leadership, la passivité, et la neutralisation des bonnes volontés.