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Sur les traces des fragments de l’identité arménienne en Turquie

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L’ONG Yerkir  développe depuis plus d’une dizaine d’années des programmes en Turquie dans le but d’établir des ponts avec les sociétés civiles turque, kurde et les populations crypto-arméniennes (islamisée ou alévisée).

En 2010, l’ONG Yerkir lançait un programme visant à retrouver une part de l’héritage du patrimoine culturel immatériel arménien encore vivant en Turquie tout en pérennisant l’enseignement de la musique traditionnelle arménienne. Il s’avère que certaines populations en Turquie ont gardé et continuent de préserver des fragments de culture arménienne, dont des chants, des musiques et des instruments. On trouve un éventail complet d’œuvres arméniennes référencées par des artistes et musiciens Zazas, Kurdes, Crypto-Arméniens ou Hamchènes.

Buts du projet :

Faire des études ethnographiques et ethnomusicologiques sur la pratique d’instruments et de genres musicaux arméniens ayant encore cours en Turquie dans des populations de l’Arménie Occidentale (Hamchène, Zaza, Kurde, Alévie, Crypto-Arménienne…).

Mise en réseau de musiciens d’instruments traditionnels d’Arménie et de Turquie par le biais de workshops et de résidences.

Étudier les instruments traditionnels disparus ou en voie de disparition et les réhabiliter.

Restituer le projet en organisant des concerts en Turquie et en Arménie.

Objectifs du projet :

Création d’un groupe d’étude composé de professionnels de la musique traditionnelle arménienne à Erevan (musicologues, musiciens, luthiers, historiens de l’art, ethnologues).

Étudier les instruments toujours joués en Arménie Occidentale (bargabezouk/dgzar, ghaval, saz…) aujourd’hui le nord-est de la Turquie.

Organiser des voyages d’études ethnographiques et ethnomusicologiques en Turquie pour recenser la pratique de genres musicaux et la fabrication d’instruments arméniens.

En dehors du caractère culturel et de préservation du patrimoine, ce projet pourra aussi participer au dialogue entre les sociétés civiles arméniennes et turques par le biais d’un héritage commun, la musique traditionnelle arménienne.

Au départ ce projet s’est articulé, à Erevan, autour d’un groupe d’étude composé d’experts de la musique traditionnelle arménienne sous la direction du musicologue Norayr Kartashyan. Sa mise en œuvre a débuté, en novembre 2010, par la création d’un ensemble musicale de recherche ethnomusicologique, le Van Project, composé d’une vingtaine d’étudiants du Conservatoire Nationale d’Arménie âgés de 16 à 20 ans. Cette troupe constitua l’ossature d’un programme qui permettra de faire revivre l’enseignement d’instruments et de genres musicaux arméniens perdus.

Entre 2010 et 2013, plusieurs missions d’études ethnographiques et ethnomusicologiques se sont rendues en Turquie. Ces missions ont permis par le biais de workshops et de résidences de faire travailler les musiciens du Van Project et des musiciens locaux. De nombreux concerts ont été donnés par le Van Project à Erevan et en Turquie (Münzür Festival du Dersim, Festival Arguvan de Malatya, Diyarbakir, Van et Istanbul). Lire les récits de missions en Turquie : Le retour au pays… sur les traces de l’héritage arménien en Turquie.

Au cours de ces trois années, le Van Project a pu réhabiliter des instruments et des musiques arméniennes, mais il a aussi permis de faire revivre l’identité arménienne en Turquie et de créer des liens inédits entre des populations qui n’avaient pas ou peu de contacts entre elles auparavant. Près de cent ans après le Génocide arménien, l’action de l’ONG Yerkir prouve que bien des choses restent à entreprendre sur ces terres restées trop longtemps en friche depuis 1915.

MISSION ETHNOGRAPHIQUE EN TURQUIE & ARMÉNIE OCCIDENTALE

Une mission d’études ethnographiques et ethnomusicologiques s’est rendue en Turquie du 18 juillet au 4 août 2011 dans les régions Hamchènes et au Dersim.

En complément de l’ensemble musical Van Project, composé de 16 personnes, une ethnomusicologue de l’Université d’Etat d’Erevan, participait à cette mission. L’objectif était de compiler les données des recherches d’une manière plus académique dans le but de répertorier et de coordonnées nos recherches avec celles du département d’Ethnomusicologie de l’Université d’Etat de Erevan.

Dans un souci de recenser les restes de l’identité arménienne, dans les régions visitées nous avons couplé cette mission d’ethnomusicologie, axé essentiellement sur la musique, d’une mission ethnographique pour couvrir les autres champs de recherche comme la tradition orale, les pratiques religieuses, les lieux de cultes, les crypto-arméniens… Nous avons délégué ces recherches au professeur émérite d’ethnologie de l’Académie des Sciences d’Arménie, Hranush Kharatyan et à la Turcologue de l’Université d’Etat de Erevan, Anush Hovhannisyan, le chargé des projets de Yerkir à Erevan, Robert Tatoyan complétait cette mission.

Cette mission ethnographique et ethnomusicologique en Turquie a pu se réaliser grâce à un partenariat avec la fondation turque Anadolü Kültür. Cette fondation nous a permis de faire un travail en amont de contacts dans les régions visités et elle a dépêché durant toute la durée du voyage, une chargée de mission pour nous accompagner et faciliter les démarches administratives et de logistiques. La Fondation Anadolü Kültür a aussi pris en charge la participation d’une ethnomusicologue turque de l’université d’Istanbul à ce projet.

Durant ce séjour en Turquie, plusieurs workshops ont pu se dérouler avec des musiciens locaux dans le pays Hamchène et au Dersim. Trois concerts du Van Project ont été organisé dans le cadre de festival : Arguvan de Malatya, le 24 juillet 2011 (5 000 personnes), Münzür Festival du Dersim, concert du « Van Project » le 29 juillet à Ovaçik (5 000 personnes) et Hozat le 30 juillet (7 000 personnes).

REHABILITATION DE LA CORNEMUSE ARMENIENNE, LE DGZAR

Le premier instrument que le Van Project a réhabilité est une cornemuse traditionnelle arménienne, le Dgzar ou Bargabzoug. Instrument populaire des montagnards du plateau arménien, c’est une variante de la cornemuse. Il est composé d’une poche de cuir ou de peau qui permet de sortir les sons de plusieurs roseaux. Cet instrument avait pratiquement disparu d’Arménie mais il était encore utilisé en Turquie par les Hémichis des régions de Rize et d’Artvin (Arméniens Hamchène, islamisés au XVIIIème siècle) sous le nom de Tulum.

Des missions d’études d’experts du Van Project se sont déplacées en Turquie pour étudier les Tulums et en rapporter en Arménie. Avec l’aide d’un des derniers musiciens à savoir en jouer en Arménie, le Varbed (maître) du Dgzar, Vladimir Smbatyan (80 ans) nous avons pu en recomposer le process de leur fabrication et transmettre sa pratique musicale aux nouvelles générations en Arménie.

La cornemuse arménienne, le Dgzar

RENCONTRE EN PAYS HAMCHÈNE - Arméniens Islamisés au XVIIIe

L’ONG Yerkir a missionné un groupe d’experts d’Arménie (turcologues, ethnologues, ethnomusicologues) accompagné de l’ensemble musical Van Project pour aller à la rencontre des Hémichis des régions de Rize et d’Artvin.

Les Hémichis sont des arméniens du Hamchène (Hamchèntsi) qui ont été islamisés au XVIIIe mais qui parlent encore un dialecte arménien (Homshetsma) et pratique des instruments et des genres musicaux issus du folklore arménien. Plusieurs workshops et résidences musicales ont été organisés avec des artistes et musiciens Hémichis dans les villes d’Hopa, Çamlıhemşin et Hemşin avec le Van Project.

Ces résidences musicales visaient à retrouver une part de l’héritage du patrimoine culturel arménien encore vivant chez les Hémichis. Grâce à ces liens tissés avec les Hémichis nous avons pu réhabiliter en Arménie la cornemuse arménienne, le Dgzar et ré-arméniser des musiques et des chansons issues de la culture Hémichie.

Çamlıhemşin

Hemşin

Hopa

Malatya - Workshop et concert du Van Project

DERSIM - TERRE DE RÉSISTANCES

En juillet 2011, l’ONG Yerkir missionna un groupe d’ethnologues et de turcologues sous la direction de Hranouch Kharatyan de l’Académie des Sciences d’Arménie. L’objectif était de faire une étude sur l’Alévisation des Arméniens de cette région au fil des siècles. L’ensemble musical d’Erevan, Van Project, venait compléter ce projet pour faire des recherches d’ethnomusicologie sur les fragments de culture arménienne auprès des populations locales.

Le Dersim est une terre arménienne aux particularismes venant du plus profond des âges. Un îlot montagneux escarpées aux confins Ouest du plateau Arménien, entre Elazig (Kharpet) et Erzindjan. Dès l’Antiquité, divisée en plusieurs principautés arméniennes, la région ne fut jamais totalement arménisée. Certaines populations auraient gardé des pratiques religieuses païennes proto-arméniennes jusqu’à la période contemporaine.

Le Dersim constitue une forteresse naturelle d’environ 7 700 km2, où les peuples pourchassés au fil des siècles par l’Empire Ottoman (Kizilbaches, Zazas, Alévis, Yézidis, Kurdes…) venaient se réfugier. Rebelle, le Dersim ne fut jamais vraiment soumis au pouvoir Ottoman. L’esprit de rébellion et de solidarité entre les différentes populations a permis aux Arméniens d’être en partie protégés durant le génocide de 1915. Dans l’idée de terminer le travail et de briser les résistances Kurdes, Mustafa Kemal lancera en 1937 une grande offensive militaire pour les exterminer et exiler. Depuis, Tunceli est le nouveau nom administratif donné par la République Turque pour débaptiser le Dersim.

Le Van Project participera au Munzur Festival du Dersim et se produira lors de plusieurs concerts devant des dizaines de milliers de spectateurs. Lors du concert à Ovaçik, le Van Project sera accueilli par la maire qui, mi-sérieux mi-rigolard, leur lancera “Bienvenue dans votre village… j’espère que vous n’êtes pas venus nous réclamer vos terres… car vous en auriez le droit !”. Plusieurs anecdotes résument le caractère Arménophile de la population du Dersim, comme ce chanteur dans une fête champêtre, sans savoir que des Arméniens étaient présent, dira avant d’entonner une chanson « Nous sommes aussi des Arméniens, n’oubliez pas l’histoire du Dersim ». Combien de personnes rencontrées nous avouerons avoir une ascendance arménienne. Cette dame à la fin du concert qui se jettera en pleurant dans les bras de Noraïr Kartachyan, le Maestro du Van Project, en disant qu’elle était Arménienne.

Ovaçik

Nazımiye

Hozat

Istanbul, septembre 2011 - Remise des prix Hrant Dink

Lors de la soirée en hommage à Hrant Dink, le 14 mars 2011, à Erevan en présence des intellectuels turcs, Cengiz Aktar et Ali Bayramoglu, ce dernier, en tant que président du jury du prix Hrant Dink, séduit par la qualité et le sens du projet, a invité le Van Project à se produire à Istanbul lors de la remise des prix de la Fondation Hrant Dink.

Diyarbakir, septembre 2011 - Ouverture du Social Forum

Dans le cadre du Social Forum « Mesopotamia », organisé à Diyarbakir, le Van Project a été invité par la municipalité pour assurer la partie artistique de l’ouverture du Forum Social du 21 septembre 2011.

Erevan, avril 2012 - Concert de restitution du Van Project

Le 2 avril 2012, l’ensemble musical Van Project donnait un concert au Théâtre Hagop Baronian de Erevan en restitution de ses travaux.

Diyarbakir, septembre 2012 - Concert du Van Project

Invité par la municipalité de Diyarbakir, l’ensemble Van Project a établi une résidence au conservatoire municipal Aram Tigran pour travailler avec des musiciens locaux. Ces sessions musicales se sont conclus par un concert le 6 septembre 2012.

Van, septembre 2012 - Concert du Van Project

Le 8 septembre 2012, à l’invitation de la municipalité de Van, le Van Project c’est produit lors d’un concert pour l’inauguration du Kûltür Park.